[WEBINAIRE] Pratiques en périnatalité : quelles nouvelles recommandations ?

Session 8 du cycle de webinaires consacré à la santé environnementale du jeune enfant et organisé par la Mutualité Française Pays de la Loire et l’Agence régionale de santé dans le cadre du PRSE3.

Ce webinaire a été suivi le 1er février 2022 par des professionnel.les de la périnatalité et de la petite enfance.

Autour de la table des intervenants : Rémi BERANGER, sage-femme épidémiologiste au CHU de Rennes, INSERM, EHSP et Mélie ROUSSEAU, coordinatrice du Projet FEES, Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique. (voir onglet Les intervenants)

LE SUJET

En juillet 2021, le collège national des sages-femmes (CNSF) consacrait ses deuxièmes grandes « Recommandations de pratique clinique » aux interventions pendant la période périnatale.

Ces nouvelles recommandations positionnent la prévention au cœur des interventions en période périnatale, et engagent les professionnels à améliorer le suivi médical en intégrant pleinement la dimension de prévention des 1 000 premiers jours.

Cette nouvelle édition accorde une place importante aux questions de santé environnementale et d’exposition aux polluants intérieurs. Plusieurs chapitres y sont consacrés autour notamment de l’usage des cosmétiques, des produits chimiques domestiques, de l’alimentation…

C’est la première fois que les recommandations du CNSF intègrent explicitement des éléments pour limiter la contamination aux polluants intérieurs.

Ce webinaire se proposait de les passer en revue.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Des recommandations en 10 chapitres selon 4 axes

Les recommandations de pratique clinique (RPC) ont pour but de définir les messages et les interventions de prévention à délivrer aux femmes et aux parents par les différents professionnels de la périnatalité. Les recommandations sont divisées en dix chapitres, répartis sur quatre axes :

  • l’adaptation des comportements maternels (activité physique, substances psychoactives)
  • les comportements alimentaires
  • l’exposition domestique aux agents toxiques (usages domestiques, cosmétiques)
  • la promotion de la santé de l’enfant (allaitement maternel, liens d’attachement, écrans, mort inattendue du nourrisson, syndrome du bébé secoué).

Une hiérarchie des différents messages de prévention a été proposée selon les périodes afin de tenir compte des contraintes de temps rencontrées par les professionnels.

Informer les femmes pendant la grossesse n’est pas si simple

Les femmes qui attendent un enfant représentent une population jeune et réceptive.
Avides de conseils, elles consultent de nombreux professionnels de santé (18 contacts en moyenne). Cependant, une étude de l’ARS Nouvelle Aquitaine témoigne que, si de nombreux conseils sont suivis, il existe une très grande disparité de mise en pratique en fonction du milieu social.

Il demeure également des indicateurs préoccupants sur des facteurs de risques : l’obésité et le surpoids sont en augmentation, la diminution de la consommation de tabac et d’alcool stagne et la consommation de cosmétiques ne cesse de progresser, exposant les femmes à un plus fort risque de contamination aux produits toxiques contenus dans ces cosmétiques.

Pour les professionnels, la prévention sur ces sujets nouveaux est encore difficile.
57 % des sages-femmes ne transmettent aucune information sur les perturbateurs endocriniens. Deux raisons à cela :  le sujet n’est pas forcément maîtrisé et de nombreux messages de prévention, autres que ceux liés aux perturbateurs, doivent être délivrés aux femmes dans des temps resserrés. La hiérarchisation des informations à délivrer n’est donc pas aisée.

Une méthode pour aider à diffuser des messages de prévention

L’objectif des recommandations du collège national des sages-femmes est précisément de permettre :

  • de hiérarchiser les recommandations selon les différentes périodes de la grossesse et en fonction de la réalité du risque
  • de les harmoniser entre elles afin d’éviter les contradictions.

La méthode développée s’appuie sur la recherche d’un consensus scientifique collectif et partagé. Un niveau de preuve permet de graduer les recommandations.

Enfin les recommandations sont formulées en population générale et donc non spécifique à une région, un régime alimentaire ou un comportement particulier. Par exemple, la consommation de poisson étant globalement très insuffisante, la recommandation est tout simplement d’augmenter la portion hebdomadaire de poisson sans entrer dans le détail du type de poisson. Pour les fumeuses, le conseil sera d’orienter vers un tabacologue.

Cliquer sur l’image pour l’agrandir

Quelles postures adopter en tant que professionnel ?

  • Hiérarchiser les messages selon les périodes et les risques afin que les informations principales ne soient pas court-circuitées par des messages secondaires.
  • Etre à l’écoute de la personne et de son vécu
  • Répondre en premier lieu aux questions des parents. Ils seront en effet moins réceptifs aux autres conseils s’ils n’ont pas eu réponse à leurs propres questionnements.
  • Etre attentif aux croyances des personnes surtout quand elles vont à l’encontre des conseils à transmettre
  • Tenir compte du niveau socio-économique des personnes, de leurs habitudes alimentaires
  • Eviter les discours discordants et ne pas hésiter à dire « je ne sais pas » ou « la science n’a pas encore tranché sur ce sujet ».

L’exposition aux polluants via l’alimentation

C’est une thématique prioritaire, notamment en préconception et en début de grossesse. Elle s’appuie sur une analyse des bénéfices/risques et non une approche centrée sur le danger. Ainsi le bénéfice à consommer davantage de fruits et légumes l’emporte largement sur le risque lié à la présence de résidus de pesticides.

Les conseils à transmettre :

  • Augmenter la portion de fruits et légumes
  • Augmenter la consommation de poissons (notamment gras)
  • Utiliser des matériaux de cuisine stables (verre, inox, porcelaine) pour la cuisson
  • Eviter la cuisson à forte température

L’exposition aux substances chimiques

CONSTATS AVERES

] Identification des substances prioritaires reprotoxiques et présentes au quotidien

  • Hors pesticides : 38 substances prioritaires ont été identifiées dont principalement l’éther de glycol présent dans les produits ménagers, les peintures ou le mobilier.
  • Pesticides : 45 substances identifiées dont 24 sont des insecticides présents dans les insecticides domestiques (contre les moustiques, les mouches, etc.), dans les traitements des parasites des animaux ou du bois.

] Identification des mesures interventionnelles limitant effectivement les expositions au domicile (2 exemples)

  • Les études Estéban et Elfe confirment l’augmentation des contaminations par les phtalates, par le tabagisme, par l’absence d’aération. La teneur de ces contaminations diminue avec le lavage des mains et le dépoussiérage.
  • S’agissant des pesticides, le taux d’exposition baisse significativement dans une pièce aérée, grâce au lavage des mains ou le port de gants.

RECOMMANDATIONS AVEC ATTRIBUTION DE GRADE EN FONCTION DE LA SOLIDITE SCIENTIFIQUE

] Pour diminuer l’exposition existante :

  • Aérer 10 minutes deux fois par jour
  • Vérifier le bon fonctionnement de la ventilation.
  • Dépoussiérer avec un aspirateur et de la micro-fibre
  • Se laver les mains après tout geste contaminant ou avant la cuisine.

] Pour réduire les émissions :

  • Favoriser l’arrêt du tabac
  • Veiller au bon entretien et usage des appareils de chauffage pour éviter les intoxications au monoxyde de carbone
  • Déballer les meubles neufs et les aérer avant de les mettre en place dans le logement
  • Eviter les parfums d’ambiance
  • Laver les textiles neufs avant usage
  • Choisir des produits de bricolage écolabels, sans pictogramme de dangerosité ou étiquetés A +
  • Réduire les expositions aux pesticides : en se protégeant des contaminations, en favorisant les traitements mécaniques…

] Pour les populations vulnérables (femmes enceintes, allaitantes et jeunes enfants) :

  • Ne pas participer aux travaux de bricolage
  • Limiter l’usage de pesticides
  • Limiter le nombre de produits ménagers et de cosmétiques utilisés.

L’exposition aux polluants via les cosmétiques

  • Limiter le nombre de produits, leur fréquence et leur quantité
  • Eviter l’utilisation des huiles essentielles, du vernis, des colorations
  • Préférer des produits avec labels environnementaux

SUPPORTS D'INTERVENTION

LES INTERVENANTS

Mélie ROUSSEAU,
Sage-femme, coordinatrice du projet Femmes Enceintes Environnement et Santé (FEES) à l’Association pour la Prévention de la Pollution Atmosphérique et contributrice des recommandations.

 

Rémi BERANGER,
Sage-femme clinicien, enseignant et chercheur (CHU de Rennes / Inserm UMR 1085 – IRSET) et coordinateur des travaux du CNSF

 

POUR ALLER PLUS LOIN

[SITE INTERNET] Tous les chapitres des recommandations de pratique clinique du CNSF

[PDF] Synthèse des recommandations de pratique clinique du CNSF

[SITE INTERNET] Etude sur la qualité de l’environnement intérieur des jeunes mamans
– ARS Aquitaine : rapport complet et synthèse –

LE CYCLE DE WEBINAIRES

Le cycle de webinaires « Devenez relais santé environnementale du jeune enfant » est proposé par la Mutualité Française Pays de la Loire et l’ARS Pays de la Loire dans le cadre du PRSE3. Il s’adresse aux professionnels de la périnatalité et de la petite enfance.

Son objectif : proposer une culture commune sur les connaissances fondamentales en santé environnementale et apporter des conseils simples à transmettre aux publics accompagnés par les professionnels.

Les sessions :

Informations : Gaëlle VIOLET – Mutualité Française Pays de la Loire – 06 27 99 15 82 – gaelle.violet@mfpl.fr

Autres outils & documents