[WEBINAIRE] Eco-nettoyage : quels intérêts, quelles solutions ?

Session 9 du cycle de webinaires consacré à la santé environnementale du jeune enfant et organisé par la Mutualité Française Pays de la Loire et l’Agence régionale de santé dans le cadre du PRSE3.

Ce webinaire a été suivi le 7 mars 2022 par des professionnel.les de la périnatalité et de la petite enfance.

Il était animé par Gaëlle VIOLET de la Mutualité Française Pays de la Loire avec l’intervention de Philippe CARENCO, médecin hygiéniste au centre hospitalier de Nice.

LE SUJET

A NOTER
Ce webinaire se propose de partir des situations des établissements hospitaliers
où les exigences d’hygiène sont draconiennes.
Hospitalo-centrés, les constats et conseils abordés dans ce webinaire
peuvent cependant trouver une déclinaison
à adapter aux besoins des établissements Petite enfance.

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L’hygiène des locaux en milieu hospitalier est une condition préalable aux soins.

Mais l’usage massif de détergents et de désinfectante a des conséquences importantes sur l’environnement et la santé.

Il est pourtant possible de concilier performance de l’hygiène et respect de la santé environnementale.

Pour exemple, dans les établissements hospitaliers de la région Provence Alpes Côtes d’Azur, où les méthodes d’éco-nettoyage ont été mises en œuvre, on observe une diminution de 45 % de produits utilisés, une économie de 24 % du budget Nettoyage et moins d’accidents de travail liés aux chutes.

Ce webinaire invite à mieux comprendre les raisons d’agir, avec des solutions à l’appui.

CE QU'IL FAUT RETENIR

Impacts environnementaux du nettoyage

L’impact du nettoyage hospitalier se mesure notamment sur les rejets liquides et solides, que l’on retrouve dans les égouts.

  • Une grande volumétrie d’eau est utilisée en milieu hospitalier (4 à 10 fois plus par jour par personne qu’en milieu domestique)
  • Les rejets hospitaliers ont une forte concentration en produits désinfectants et nettoyants. Ils présentent une écotoxicité plus marquée avec la présence de bactéries multirésistantes et un risque de dispersion dans l’environnement, notamment via l’épandage des boues d’épuration des stations.
  • Pour les établissements hospitaliers équipés de leur propre station d’épuration, leur efficacité est moins bonne qu’en milieu ordinaire en raison d’une biodégradabilité très partielle des détergents et d’une concentration et d’une diversité bactérienne plus faibles, ce qui altère le fonctionnement de la station d’épuration dédiée.

Impacts sanitaires du nettoyage

Les désinfectants ont plusieurs effets possibles sur la santé :

  • écotoxicité (c’est la propriété qui est recherchée)
  • génotoxicité (qui altère le gène) notamment pour les dérivés du chlore (javel)
  • perturbateurs endocriniens pour certains

En santé publique, la plus grande inquiétude sanitaire est la résistance microbienne induite par l’usage massif d’antibiotiques et de désinfectants. La résistance antibactérienne se produit via les rejets non traités dans la nature et contamine jusqu’à la faune sauvage, y compris celle étant très peu en contact avec l’Homme.

En usage professionnel, les risques sanitaires du nettoyage sont en général insuffisamment perçus. Les maladies professionnelles les plus fréquentes sont les asthmes et les dermites de contact, ce dernier risque pouvant être facilement évité par le port de gants adaptés.
Nota : les solutions hydroalcooliques ne présentent pas de risques CMR (exposition à des agents cancérigène- mutagènes et reprotoxiques) ou de risques Perturbateurs endocriniens.

Pour la population générale, le risque majeur en santé provient des perturbateurs endocriniens avec notamment les alkylphénols contenus dans certains détergents ou le triclosan utilisé dans les produits anti-bactériens. Au-delà des perturbateurs endocriniens, une étude canadienne a révélé une surreprésentation d’enfants obèses chez les ménages utilisant régulièrement de l’eau de javel. La détérioration de la flore bactérienne environnementale ainsi induite par l’eau de javel dégrade également la flore bactérienne intestinale de l’Homme, flore intestinale qui joue un rôle important dans les risques d’obésité.

Quand et comment désinfecter ?

Il s’agit d’abord d’interroger les protocoles en fonction des risques réels et donc de déterminer les besoins avérés de désinfection.

Pour rester efficace, une désinfection doit être effectuée au maximum 2 heures avant tout usage de la surface ou des locaux. Une surface désinfectée est en effet entièrement recolonisée au bout de 2h00.

Il convient également de nettoyer, laver, voire détartrer, une surface avant toute désinfection, au risque de rendre cette dernière inefficace. Une fois accumulés sur une surface, les salissures, le calcaire ou encore les microbes créent un biofilm protecteur qui rend toute désinfection vaine s’il n’est pas éliminé avant de désinfecter.

En cas d’épidémie ou de problème spécifique, il convient d’utiliser le désinfectant approprié au problème : un virucide pour un virus, un antifongique contre un champignon etc.
Il ne faut donc pas hésiter à solliciter les conseils des experts en hygiène et propreté.

Comment réaliser un nettoyage efficace ?

NETTOYAGE AVEC DES PRODUITS ISSUS DE PROCESSUS CHIMIQUES

Parmi les agents chimiques, on distingue les savons (action de saponification) des détergents (issus de la pétrochimie). Ces derniers sont plus efficaces mais plus irritants.

Il existe par ailleurs une nouvelle génération de détergents à base de tensioactifs biosourcés (non issus de la pétrochimie pour tout ou partie). Dans les établissements où ils sont utilisés, les études ont observé une baisse des bactéries multi-résistantes et une diminution des infections.

Conseils :

  • Pour choisir ses détergents (biosourcés ou non) il est possible de s’appuyer sur des labels qui limitent le nombre de substances chimiques tout en garantissant l’efficacité du produit.
  • Selon le cercle de Sinner, quatre paramètres variables vont régir une opération de nettoyage efficace : le temps de contact, la température, l’action mécanique et la chimie. En fonction du besoin, il est donc possible de diminuer l’usage de la chimie en augmentant un ou plusieurs des trois autres paramètres.

NETTOYAGE AVEC DES TECHNIQUES SANS CHIMIE

Des plus simples sans gros investissements aux plus mécanisées, plusieurs alternatives pour se passer de produits chimiques existent :

  • le vinaigre blanc est très efficace pour détartrer et éliminer certaines bactéries.
  • le bicarbonate a une action abrasive et antibactérienne. Il peut par exemple être utilisé dans une poubelle de couches pour limiter les mauvaises odeurs.
  • la microfibre agit par action mécanique. Elle nécessite peu d’eau mais implique un excellent entretien et séchage après usage, au risque de développements micro-bactériens.
  • les auto-laveuses à plateau existent en tailles différentes. Elles ne doivent cependant pas être utilisées sur des dalles amiantées.
  • les mono-brosses sont très efficaces mais nécessitent une bonne formation.
  • le nettoyage vapeur permet une désinfection efficace, que la machine soit de type professionnel ou domestique. Avec des formats maniables, le nettoyage à la vapeur peut également être utilisé pour d’autres surfaces comme le nettoyage des berceaux.

ATTENTION AUX INVESTISSEMENTS INUTILES

Certaines techniques sont proposées, avec des stratégies de marketing parfois très pressantes. Toutes n’ont pas fait preuve de leur efficacité, ni en milieu hospitalier ni en crèche. Elles sont coûteuses et sans résultat garanti. Nous pouvons notamment citer :

  • l’électrolyse d’eau salée est sensée produire un désinfectant (chlore) et un détergent mais leurs concentrations sont trop faibles pour être efficaces en tant que désinfectants.
  • l’eau activée par électrolyse fournit de l’eau oxygénée mais la durée de vie du produit est très courte.
  • l’eau ozonée a également une durée de vie très courte (une quinzaine de minutes dans de l’eau « pure »).

REPLAY et POWERPOINT

L'INTERVENANT

Philippe CARENCO
Médecin-hygiéniste, Philippe Carenco est responsable du service d’hygiène au CHU de Nice. Il est membre du CPIAS Provence Alpes Cotes d’Azur (Centre d’appui pour la prévention des infections associées aux soins). Il a notamment contribué à la réalisation du guide de l’éco-nettoyage coordonné par l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes.

POUR ALLER PLUS LOIN

[GUIDE] Guide de l’Eco-nettoyage, ARS Auvergne Rhône Alpe, 2021

[GUIDE] Achat de produits, matériel et prestation de nettoyage, Ministère de l’économie, juin 2009

[GUIDE] Pour une bonne gestion des déchets produits par les établissements de santé médico-sociaux, Ministère des solidarités et de la santé, 2016

[CENTRE RESSOURCES] Centre d’appui pour la Prévention des Infections Associées aux Soins des Pays de la Loire

[INITIATIVE] L’hôpital de Guéret innove dans ses techniques de nettoyage

[INITIATIVE] Les produits d’entretien naturels en collectivité – Témoignage de la ville de Roubaix

[ETUDE] Antibiorésitance et environnement, ANSES, , 2020

[ETUDE] Asthme professionnel dû aux désinfectants en milieu hospitalier, INRS, 2000

[ETUDE] Exposition postnatale aux désinfectants ménagers, au microbiote intestinal du nourrisson et risque subséquent de surpoids chez les enfants – en anglais – CMAJ, sept 2018

PS : d’autres études citées par Philippe Carenco sont référencées dans son support d’intervention

LE CYCLE DE WEBINAIRES

Le cycle de webinaires « Devenez relais santé environnementale du jeune enfant » est proposé par la Mutualité Française Pays de la Loire et l’ARS Pays de la Loire dans le cadre du PRSE3. Il s’adresse aux professionnels de la périnatalité et de la petite enfance.

Son objectif : proposer une culture commune sur les connaissances fondamentales en santé environnementale et apporter des conseils simples à transmettre aux publics accompagnés par les professionnels.

Les sessions :

Informations : Gaëlle VIOLET – Mutualité Française Pays de la Loire – 06 27 99 15 82 – gaelle.violet@mfpl.fr

Autres outils & documents